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Un début d'article trouvé sur le net.
En fait, c'est le début de la fin de Dufour le célèbre fabricant de fraiseuses.
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Le dépôt de bilan de l'entreprise Dufour illustre les difficultés d'une firme contrainte d'innover dans des conditions périlleuses
" G. Dufour, machines-outils " : une vaste usine en briques rouges boulevard Chanzy à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Derrière la façade proprette, un peu rétro, 25 000 mètres carrés d'ateliers silencieux. L'entreprise a déposé son bilan le 15 juillet. La veille, les sept cents salariés - dont plus de la moitié sont des immigrés - s'étaient mis en grève parce qu'ils n'avaient pas touché la paie du 30 juin. Ils ont reçu leur lettre de licenciement vers le 1er août.
Depuis lors, des équipes de syndicalistes de la C.G.T. et de la C.F.D.T. se relaient jour et nuit pour occuper les locaux.
Par JEAN BENOIT. Publié le 12 août 1980 à 00h00 - Mis à jour le 12 août 1980 à 00h00
Temps deLecture 7 min.
Étrange destin que celui de cette affaire familiale fondée il y a plus d'un demi-siècle par Gaston Dufour - humble artisan devenu, par ses propres moyens, un important industriel. " Avec le vieux Dufour, expliquent les ouvriers, c'était pas la joie, parce que c'était un patron du dix-neuvième siècle, mais l'usine marchait bien. "
Dans les années 60 - celles de l'expansion - Gaston Dufour n'arrivait pas à répondre aux commandes. Il fabriquait alors uniquement des fraiseuses classiques, le tout-venant des machines-outils. Une caractéristique de l'entreprise : les stocks représentent - lourd handicap dans la période actuelle - jusqu'à neuf mois du chiffre d'affaires annuel, contre une moyenne de quatre à cinq mois dans les autres usines de machines - outils. " Pas rentable, Dufour ? Mais on a tenu le coup jusqu'il y a cinq ans ! ", s'écrie M. Yves Tanguy, le délégué syndical C.G.T.
La concurrence allemande et japonaise, mais surtout l'apparition de la crise, en 1974, causent les premières difficultés. Le bilan accuse une perte d'environ 1 million de francs en 1976, 3,5 millions de francs en 1977, 3 millions de francs en 1978, année où la société prend cependant une importante participation (près de 50 %) dans une fonderie de la Sarthe : l'usine Fatz, une centaine d'ouvriers, à La Ferté-Bernard, elle-même en déficit cumulé de 7,5 millions de francs de 1976 à 1979.
Un atout : la " machine éternelle "
Il y a deux ans, le " vieux " meurt à la tâche. Son fils, M. André Dufour, reprend les rênes, entouré de cadres qui, pour la plupart, sont sortis du rang. Grand, maigre et sanguin, les cheveux taillés en brosse, le nouveau patron est un homme énergique et ambitieux, doublé d'un excellent technicien. Il n'entend nullement laisser taxer son entreprise de " canard boiteux ", à l'heure où s'opèrent de profonds bouleversements dans le secteur de la machine-outil frappé par les restructurations. En parfaite convergence avec les consignes du ministre de l'industrie, où l'on prône l'innovation technologique, il crée de toutes pièces, avec un bureau d'études squelettique, une fraiseuse " à banc fixe ", la T-7000. C'est une énorme machine qui peut supporter des pièces d'acier d'un volume d'un mètre cube et pesant jusqu'à cinq tonnes. Au contraire des fraiseuses à console bâties sur un pied, la fraiseuse à banc fixe repose entièrement sur le sol, ce qui accroît la stabilité de l'ensemble : les techniciens de Dufour l'appellent " la machine éternelle ". Autre atout : la fraiseuse est couplée avec un ordinateur qui, une fois programmé, commande toutes les opérations, effectuées à l'aide d'un change-outils automatique, sans intervention humaine, et avec une précision d'usinage de sept microns (sept millièmes de millimètres), chiffre assez fantastique que l'on espère porter à cinq microns, loin devant les machines étrangères du même type.
En fait, c'est le début de la fin de Dufour le célèbre fabricant de fraiseuses.
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Le dépôt de bilan de l'entreprise Dufour illustre les difficultés d'une firme contrainte d'innover dans des conditions périlleuses
" G. Dufour, machines-outils " : une vaste usine en briques rouges boulevard Chanzy à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Derrière la façade proprette, un peu rétro, 25 000 mètres carrés d'ateliers silencieux. L'entreprise a déposé son bilan le 15 juillet. La veille, les sept cents salariés - dont plus de la moitié sont des immigrés - s'étaient mis en grève parce qu'ils n'avaient pas touché la paie du 30 juin. Ils ont reçu leur lettre de licenciement vers le 1er août.
Depuis lors, des équipes de syndicalistes de la C.G.T. et de la C.F.D.T. se relaient jour et nuit pour occuper les locaux.
Par JEAN BENOIT. Publié le 12 août 1980 à 00h00 - Mis à jour le 12 août 1980 à 00h00
Temps deLecture 7 min.
Étrange destin que celui de cette affaire familiale fondée il y a plus d'un demi-siècle par Gaston Dufour - humble artisan devenu, par ses propres moyens, un important industriel. " Avec le vieux Dufour, expliquent les ouvriers, c'était pas la joie, parce que c'était un patron du dix-neuvième siècle, mais l'usine marchait bien. "
Dans les années 60 - celles de l'expansion - Gaston Dufour n'arrivait pas à répondre aux commandes. Il fabriquait alors uniquement des fraiseuses classiques, le tout-venant des machines-outils. Une caractéristique de l'entreprise : les stocks représentent - lourd handicap dans la période actuelle - jusqu'à neuf mois du chiffre d'affaires annuel, contre une moyenne de quatre à cinq mois dans les autres usines de machines - outils. " Pas rentable, Dufour ? Mais on a tenu le coup jusqu'il y a cinq ans ! ", s'écrie M. Yves Tanguy, le délégué syndical C.G.T.
La concurrence allemande et japonaise, mais surtout l'apparition de la crise, en 1974, causent les premières difficultés. Le bilan accuse une perte d'environ 1 million de francs en 1976, 3,5 millions de francs en 1977, 3 millions de francs en 1978, année où la société prend cependant une importante participation (près de 50 %) dans une fonderie de la Sarthe : l'usine Fatz, une centaine d'ouvriers, à La Ferté-Bernard, elle-même en déficit cumulé de 7,5 millions de francs de 1976 à 1979.
Un atout : la " machine éternelle "
Il y a deux ans, le " vieux " meurt à la tâche. Son fils, M. André Dufour, reprend les rênes, entouré de cadres qui, pour la plupart, sont sortis du rang. Grand, maigre et sanguin, les cheveux taillés en brosse, le nouveau patron est un homme énergique et ambitieux, doublé d'un excellent technicien. Il n'entend nullement laisser taxer son entreprise de " canard boiteux ", à l'heure où s'opèrent de profonds bouleversements dans le secteur de la machine-outil frappé par les restructurations. En parfaite convergence avec les consignes du ministre de l'industrie, où l'on prône l'innovation technologique, il crée de toutes pièces, avec un bureau d'études squelettique, une fraiseuse " à banc fixe ", la T-7000. C'est une énorme machine qui peut supporter des pièces d'acier d'un volume d'un mètre cube et pesant jusqu'à cinq tonnes. Au contraire des fraiseuses à console bâties sur un pied, la fraiseuse à banc fixe repose entièrement sur le sol, ce qui accroît la stabilité de l'ensemble : les techniciens de Dufour l'appellent " la machine éternelle ". Autre atout : la fraiseuse est couplée avec un ordinateur qui, une fois programmé, commande toutes les opérations, effectuées à l'aide d'un change-outils automatique, sans intervention humaine, et avec une précision d'usinage de sept microns (sept millièmes de millimètres), chiffre assez fantastique que l'on espère porter à cinq microns, loin devant les machines étrangères du même type.